RAY 1

José Darroquy, 2016

C’est encore un petit jardin hors des appétits métropolitains. Elle, robe d’apparat, tissu rouge vif et coupe tiers-nue ; lui, le cheveu taillé foot mais tout autant de prestance dans son costume. Les deux alignés, droits debout, impassibles. Une cérémonie ? Une commémoration ?
Les conversations du bar deviennent inaudibles, une bonne partie des présents font désormais cercle. On ne voit plus qu’entre.

Lui faisant maintenant face, elle entoure des deux mains un 45t à hauteur de son ventre, se présentant en cible confiante. De son côté, il tire un petit sabre, s’éloigne, se retourne, se concentre et amorce le lancer. Le toc de l’estoc l’annonçait. Le voilà en Michael Palin – ou plutôt George Tremblay – accompagnant la lame pour la conduire vers la galette vinyl. Atteindra-t-elle l’objectif ? Le ventre ? Plus bas ? Au cœur ? Simplement le disque ?
Il met ce dernier sur un électrophone et rejoint sa partenaire. Les voilà chacun sur un socle d’un blanc immaculé. Le haut parleur nasille délicatement : « what a wonderful world ».
La version d’Armstrong les fait danser, langoureux et enchantés, juchés tels les figurines d’une pièce montée. Le couple virevolte ainsi jusqu’à ce qu’une gestuelle mécanique pointe. L’expression des visages semble même se figer quand le disque s’enraye sur le même sillon. La boucle sonore maintient néanmoins les corps qui s’évertuent à continuer la danse.

Un mariage peut-être, de son éclat à sa douceur contrariée.

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