Florian de la Salle est un artiste préoccupé, comme prédisposé à porter son attention, et être attentif n’est pas si simple. Être attentif est une disposition particulière, elle donne une capacité singulière, celle de l’observation, et « chez » Florian de la Salle la faculté de regarder est encouragée par cette idée que voir peut conduire à un certain émerveillement. Florian de la Salle s’émerveille réellement de ce qu’il voit apparaître lors de ses expériences et c’est sans doute l’une des particularités étonnantes et touchantes de son approche ; être capable de laisser une part d’indéterminé se révéler. Ne pas contrôler est à l’évidence un principe actif à l’œuvre ici.
Cette absence de contrôle ne signifie pas un manque de maitrise, bien au contraire. En effet, la pratique de Florian de la Salle repose sur un ensemble de techniques et de savoirs faire très variés, mais jamais utilisés à des fins préétablies, où les accidents sont même les bienvenus. C’est là toute la différence. Dire que la démarche de Florian de la Salle est expérimentale ne suffit pas, dire que l’art est du domaine de la recherche serait un peu trop convenu, il faut aller au-delà.
Il faut aller au-delà, ou alors au plus près des expériences produites. Par exemple, prendre le temps de suivre la lente progression d’une encre noire dans la fibre d’un papier buvard, donnant naissance à une immense peinture. Nous pouvons considérer cette peinture comme une manifestation singulière du temps nécessaire à sa création. Nous pouvons percevoir en elle une forme particulièrement liée à sa durée, elle porte en quelque sorte les traces de son écoulement, ce qui nous conduit à penser la pratique de Florian de la Salle sous l’angle de sa gravité. Le mot lui convient parfaitement, l’artiste l’affectionne même particulièrement en raison de son double sens ; la gravité est une propriété à la fois physique et un sentiment que l’on peut éprouver, elle est ce « poids » matériel et immatériel qui accompagne nos existences. Florian de la Salle est un artiste préoccupé car inquiet d’une certaine façon. Se poser de nombreuses questions est le propre de l’inquiétude, et toute question ne nécessite pas forcément de réponse, elle est une façon de cheminer, de réfléchir.