Entretien avec Marie Sirgue

Florian de la Salle et Dominique Robin, 2020

Entretien réalisé dans le cadre de l’exposition Rassembler (2020), collectif Acte / Lavitrine, Limoges

 

Florian de la Salle et Dominique Robin : J’ai parfois l’impression que tes objets et sculptures ne sont pas les premières choses qui t’intéressent, qu’ils sont le prétexte à des rencontres, à l’humour, au burlesque. Tu joues, tu crées des situations joyeuses, presque des blagues. Que penses-tu de ce point de vue ?

Marie Sirgue : À travers ta question je me rends compte en effet que l’Art, pour moi, est le lieu par excellence de la rencontre : personne, pays, territoire, matière, technique, etc. Par ailleurs, j’accorde, de fait, une attention particulière à ce qu’il advient au contact de l’autre. Toutefois, si la rencontre est une constante dans mon travail, elle reste un outil plus qu’une finalité. Dans l’idée de rencontre, il y a celle de « faire avec », l’idée d’un compagnonnage que j’intègre ou parfois que je me permets de contourner. Je joue, voire je rejoue, je combine des contrastes (légèreté et gravité, humour et mélancolie, noblesse et trivialité…) si bien que tout ce qui m’anime lors de ma recherche artistique se mêle et change souvent d’importance durant le processus de création. Je crée finalement des « troubles » en complicité avec le regardeur, je lui demande de l’attention et il s’en voit – je l’espère ! – récompensé.

L’idée du burlesque aussi, avec sa connotation théâtrale, me parle. Pour reprendre la definition du CNRTL, je dirais que le burlesque est « une antithèse perpétuelle entre la grandeur des actes et la bassesse du style ». Certaines de mes pièces, et notamment mes contrefaçons comme La botte et Bleue me semblent répondre à cette définition.

J’ajouterais enfin volontiers des notions comme la parodie, le grotesque, la trivialité, mais aussi l’éloge de la laideur. En somme, tous ces mots qui définissent le burlesque, et qui dévoilent les travers de la société humaine entrent dans mon vocabulaire artistique. En revanche, les blagues font rarement partie de mes outils créatifs et j’essaye d’éviter l’ironie que je maîtrise mal et que je trouve vite excluante.

Pourrait-on dire que tu cherches néanmoins à répondre à une idée par un geste adéquat ?

Oui, ou peut-être que je cherche l’idée adéquate pour répondre à un geste ? Ce qui est certain, c’est qu’il y a dans ma pratique le plaisir du geste et du soin porté à la finition des pièces. Et lorsque je ne réalise pas moi-même une œuvre, j’essaye d’en appréhender la technique et de suivre de près sa fabrication. Je m’interroge souvent sur la justesse de mes propositions et sur leur discrétion, ni par timidité, ni par effacement, mais plutôt par éthique ou par souci d’efficacité.

Comme finalité, j’essaye de montrer des pièces ouvertes avec plusieurs portes d’entrée, que le regardeur puisse choisir son émotion, son questionnement, sans que je lui impose les miens.

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