Texte de l’exposition « 4^e mur » (Memento)

Après des études en Histoire de l’art à l’université de Pau et à l’école européenne supérieure d’art de Brest, Rémi Duprat a été présenté dans de nombreuses institutions. Il est sélectionné pour la 7^e Biennale Internationale d’Art Contemporain de Moscou en 2017. Par la suite, en 2018, il participe à des résidences de créations et des expositions en Nouvelle-Aquitaine comme le Confort Moderne (Poitiers), LAC&S/Lavitrine (Limoges) et Zébra3 (Bordeaux). L’année 2019 marque sa participation au 64^e Salon de Montrouge.

Rémi Duprat questionne la sculpture documentaire et son rapport à l’image considérant le fait qu’elle peut être à la fois un document marquant, un contexte donné, mais également une fiction ouverte. Il s’attache à des pratiques culturelles – habitudes, coutumes, techniques – d’horizons et d’époques variés, pour révéler une gestuelle issue de pratiques vernaculaires, évoluant vers le domaine du sculptural. La démarche actuelle de Rémi Duprat s’articule autour d’une réflexion sur la quête d’exotisme, touchant aux pratiques et aux paysages, sur leurs modes de « consommation », et de « commercialisation ». Il questionne les origines, l’interculturalité que l’homme entretient aujourd’hui avec son milieu de vie. Son travail artistique révèle la quête d’un nouvel « eden » paysagé. Entre des mondes factices et des tentatives de fixer le naturel, les expositions de l’artiste se transforment en véritables « showroom », des oasis artistiques. Révélateur des comportements sociaux contemporains, Rémi Duprat exorcise les absurdités de notre temps. Par une exploration de la mise en scène, l’artiste rend visible la distance avec notre réalité, tout en accentuant ses problématiques concrètes et actuelles. Le fait-main, le factice et le fictionnel sont des moyens de produire des images autonomes et de proposer une réflexion sur les modifications sociétales mettant en évidence notre réalité vacillante. Le naturel et l’artificiel côtoient les limites de la réalité et de la fiction, de l’ancestral au contemporain.

Invité à créer des œuvres spécialement pour Memento, l’artiste développe un véritable environnement plastique. Les formes organiques coexistent avec les formes industrielles pour bâtir un biotope {note}1 artistique. Les installations Passion champignon et Tellement sauvage transforment les espaces de la salle poudrée et la salle de dépoussiérage en un vivarium illusoire. Le visiteur devient alors un acteur animalier propulsé dans un environnement étrange où naturel et artificiel se télescopent, où tout se joue de la perception. Tel un parc artistique « écologiquement modifié », l’installation Tellement sauvage bouscule nos visions premières dans une oscillation entre émerveillement et tromperie visuelle. Une fleur énigmatique quasi exotique donne l’illusion d’avoir poussé dans l’espace de Memento. Elle se dévoile derrière les vitres de la salle poudrée comme dans un écrin quasi naturel. Il n’en est rien, sculptée par l’artiste avec des plaques d’isolation pour maison, son apparente fragilité trouve grâce dans des matériaux dits pauvres. Dans une opération de permutation quasi génétique, Rémi Duprat injecte dans ce diorama fantasmé des cultures de champignons. Ici, l’œuvre se transforme et se régénère le temps de l’exposition. Niché au cœur d’un passage énigmatique, Mt-Everest trouve un abri inespéré pour explorer la frontière entre un « paysage produit » et un paysage naturel. Cette sculpture, traitée tel un relevé topographique, apparaît strate après strate. Le mythe de la nature, façonnée par la main de Dieu, se retrouve convoqué en carte postale d’un paysage où l’étude du détail réveille le sentiment de la contemplation naturaliste. Au sein de Memento, Rémi Duprat s’empare des espaces pour explorer et convoquer le rapport que nous entretenons avec le naturel et l’artificiel.