L’œuvre de Maya Andersson est un territoire à la mesure du corps. Au centre de cet espace encore informel, les bras délimitent une première région, circulaire, ovoïde. Cellule originelle, noyau, qui peut devenir île dans l’océan du possible. Germe de toute création, sa matière vivante est agressée, griffée, ratissée comme est labourée la terre ouverte à la semence. La limite de cette cellule est moins une frontière qu’une membrane mouvante et perméable.
Au-delà est le monde infini, illimité qui s’écrit par la différence. Il est le prolongement encore amorphe, tendant à l’organisation. Dès lors l’importance d’une orientation, au terme premier et dernier du travail. Orientation que Maya Andersson conduit comme sa propre nécessité de saisir le monde et qui devient le tropisme de la matière en voie de formation. Quatre points cardinaux vers lesquels tendent les formes, en une architecture symbolique à valeur d’archétype. De l’espace sacré nait le premier temple ; la première mosquée, aires ouvertes aux regards des dieux.
Le territoire peint au sol, appartenant au sol par la matière de ses terres mêlées, une fois dressé, flèche l’Est comme axe directeur : le cycle accompli ne peut que recommencer.
Claude Ritschard
Extrait, exposition Images de la Suisse français, Fondation Gulbenkian et pro Helvetia, Lisbonne, 1982