Angélique Aubrit et Ludovic Beilllard
J’ai eu froid cette nuit. Une décharge électrique m’a traversé des pieds à la tête, comme avant. Il y a beaucoup de souvenirs avant maintenant. Beaucoup de personnages et de fêtes violentes pour un seul film. J’ai pensé tout et son contraire pour arriver jusqu’ici, tout essayé si c’est possible. On a mis les idées au milieu, puis on les a travaillées pour arriver à quelque chose où chacun trouve un peu de son désir. Mais en vérité il y a des jours où tout rétrécit, des jours où tu ne veux plus de ces idées. Alors tu quittes. Tu marches en espérant qu’à défaut de tomber dans le vide, tu réussiras au moins à rire et pleurer à nouveau, ou à te rappeler quelque chose. Cette histoire c’est celle des autres.
Je ne reconnais personne ici, si ce n’est les murs. Tout est à sa place, comme les autres ont laissé les choses. Quelqu’un a même fait mon lit. Je sais que ça ne devrait pas être idéal, mais c’est exactement ce que je cherchais. J’ai chaud quand j’en ai besoin et froid quand j’étouffe. Le soleil se lève le matin et se couche le soir, et après c’est la lune. Je ne sais pas qui sont ces autres, mais chacun fait ce qu’iel a à faire comme s’iel était seul.e. Je n’arrive plus à me rappeler s’iels étaient là quand on est arrivé.e.s. Si c’est elles les autres ou s’ils sont morts. Je ne suis plus sûre des souvenirs que j’ai construits ni de mes mains. Quand j’y pense j’ai été les plus doux et les plus violentes. [...]
Angélique Aubrit, texte de l’exposition (extrait)
Crédits photographiques : Ludovic Beillard