Série vidéo autour de l’animal et de l’artifice
Ce qui nous regarde.
« Hybride fait partie d’une série de vidéos courtes où j’ai voulu confronter l’animal à un artifice. »
Voilà ce que nous dit l’artiste.
Mais il ne s’agit pas de n’importe quel animal ni de n’importe quel artifice. L’animal en question est un mammifère, l’artifice, un objet fabriqué par l’homme à l’image du mammifère. Chiens, loups, chevaux : ces mammifères sont des animaux domestiqués par l’homme. Mais il ne s’agit pas tant ici de domestication, de liens familiers, que plutôt d’étrangeté. Cette étrangeté est double. D’abord notre irréductible distance à l’animal. La rationalisation devient compliquée lorsqu’il s’agit d’approcher, de communiquer avec l’animal. Quelles connaissances doit-on mobiliser ? Quelles intuitions devons nous suivre, de quelle empathie s’agit-il ? Comment, en somme, nous représentons-nous cette relation ? Notons qu’il n’est encore question ici que de l’humain, ses ressentis et ses ratios. L’animal, quant à ce qu’il pense... ses catégories -rationnelles ?- ne sont pas les nôtres.
L’autre forme d’étrangeté est l’artifice : la question que nous entretenons aux représentations - nos miroirs conscientisés- se trouble ici car les mammifères semblent se reconnaître dans nos artifices. Le leurre est évidement une technique ancestrale de chasse et d’expériences scientifiques (d’observation et de rationalisation). Mais voilà que le miroir tendu ici (le leurre) ne capture pas seulement l’animal, mais notre regard, qui se voit ainsi saisi, pris en flagrant délit d’interrogation mêlé d’empathie. La question est celle de la reconnaissance. Mais de quoi ? De qui par qui ? Nous partageons le même monde semble nous dire Hybride, et cela par le jeux de la représentation et le croisement des regards capturés. Peut être que l’enjeu filmique est de saisir simultanément les regards des animaux, des humains, des acteurs et des spectateurs (des choses du monde et des catégories).
Julie Chaffort semble nous dire que nous sommes au milieux d’une route la nuit pris dans les phares d’une voiture, tout autant que les animaux.
Christophe Ballangé
14 février 2017