Surligneurs d’espace(s)

2000
Vues de l’exposition
Installation réalisée en duo avec Delphine Herreria : tissus imprimés, bottes, costumes, peintures sur papier, dessins, collages, volumes...
Centre Clark, Montréal (Canada)

 

 

Avant même d’aborder les objets conçus par les Surligneurs d’espace(s), je m’en voudrais de ne pas souligner l’attitude ou le comportement artistique auquel tente de s’adonner ce duo. De fait, Delphine et Michel Herreria ont leur pratique respective et ce qu’ils montrent à voir n’est pas le résultat d’une fusion. C’est plutôt dans le processus de création et de communication, dans cette invisibilité que tout se passe ou dirions-nous dans leur cas, que tout se joue. Car ils ont chacun leurs jouets mais préfèrent trouver un moteur pour s’amuser ensemble. D’ailleurs, m’ont-ils avoué « nous sommes plutôt LEGO qu’ÉGOcentriques ». C’est par ailleurs dans le cadre d’une résidence estivale de courte durée à Clark que ce mode d’engagement et d’échange leur a été possible. Ce qu’ils appliquent sur la scène artistique, ils tentent de le reproduire dans la vie, aspirant à une sorte de plénitude. La prise en considération de l’être plus que de l’individu, dans un groupe social donné, permettrait sans doute l’avancement dans une société. Une notion d’effacement que l’on ne retrouve pas fréquemment dans le système de l’art.

 

 

Partant d’un mode d’expression le plus souvent graphique (dessins, peintures, couture, photographie) et quelques objets au sol fonctionnant comme des dispositifs, ils ont donc choisi d’investir le lieu privé de la galerie en la pervertissant avec des fragments dont le contenu est issu d’espaces publics et urbains environnants. La galerie devient une sorte de laboratoire pour expérimenter et questionner des images concrètes et aussi mnémoniques de la cité.

Une sorte de tableau critique et « épidermique » de Montréal. Ils reconstruisent un univers en établissant des champs relationnels entre des corps et des machines inventées, dysfonctionnelles, qui mettent en scène leur vision de l’organisation de la société ainsi que certaines situations politiques locales. Quelques fois par le biais du langage, ils viennent recouper leurs propos avec la présence de mots. Derrière cela, il y a évidemment la prise de la parole nécessaire à l’homme public. Clins-d’œil, rencontres, intrigues et tensions combinés sont donc au rendez-vous afin de nous faire partager quelques « poches de résistance » et quelques « bulles d’oxygènes ».

Sonia Pelletier, texte de l’exposition publié dans Artexte, 2000

 

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