J’ai commencé à photographier en Nouvelle-Aquitaine par hasard, en 2015, à l’occasion de plusieurs séjours dans la région. Plus j’arpentais la Nouvelle-Aquitaine, plus mon désir de la photographier devenait important : j’ai alors décidé de quitter l’Angleterre pour m’installer à Poitiers en 2017 afin de commencer un nouveau chapitre pour mon œuvre photographique.
Je me suis vite rendu compte qu’en utilisant le réseau de Transport Express Régional (TER), je pouvais voyager en train à travers toute la Nouvelle-Aquitaine et que cette façon de me déplacer me servirait de guide pour photographier méthodiquement la région. Par ailleurs, au regard du réchauffement climatique, se déplacer en TER est un moyen de voyager plus durable.
Je m’intéresse à l’apparence de la Nouvelle-Aquitaine qui se transforme, disparait ou à celle qui n’a pas dû changer depuis des siècles. Il n’est pas facile d’identifier un sujet spécifique dans mes photographies, mais la meilleure description pourrait être que je recherche des motifs « vernaculaires » ou « ordinaires » dans des situations de la vie de tous les jours, dans la banalité du quotidien. Souvent, les photos révèlent des détails spécifiques et inhabituels qui peuvent inspirer des significations sur notre monde contemporain.
L’objectif du projet est de parcourir toutes les lignes TER de Nouvelle-Aquitaine pour photographier tous les lieux de la région accessibles par le train. Ce projet s’inscrit dans la lignée des travaux photographiques d’exploration du territoire comme les « campagnes photographiques » de Thibaut Cuisset (1958-2017) sur le paysage français, l’Atlas des Régions Naturelles (ARN) de Nelly Monnier et Eric Tabuchi, le tour de France de Raymond Depardon, et la Mission Photographique de la DATAR.
Mais la différence est que ces autres projets sont tous réalisés en utilisant la voiture comme moyen de transport, dans la tradition de la méthode classique du « road trip photographique ».
Cela m’amène également à évoquer le photographe français Eugène Atget (1857-1927), car comme lui il y a cent ans, je me déplace en train et à pied. L’utilisation du TER crée une autre façon de s’engager sur le territoire. Lorsque je sors d’un TER dans une gare d’un village, d’une petite ou grande ville, je n’ai pas d’autre choix que d’explorer intensément le lieu et ses environs. Je ne peux pas partir avant l’arrivée du train de retour qui est programmé plusieurs heures plus tard. Alors, je marche beaucoup, je regarde attentivement et je saisis des photos. Je m’approche lentement de mes sujets et je crois que cela me permet d’avoir une approche intime avec mon environnement, de voir des détails, de remarquer des subtilités pour la composition de mes images. Petit à petit, j’explore les lieux le long des lignes TER, gare après gare. Il m’arrive souvent de retourner à un endroit plusieurs fois, afin de l’explorer de manière plus exhaustive.
Justin Partyka