Née en 1972, Laurie-Anne Estaque vit et travaille à Aubusson dans la Creuse.
L’œuvre de Laurie-Anne Estaque se construit sur un questionnement exigeant et toujours renouvelé : quelles sont les représentations du monde aujourd’hui ? Quels en sont les signes dominants ? C’est en effet par un travail sur le signe que l’artiste produit un discours qui, pour ne pas en emprunter les formes classiques, est éminemment politique. Les moyens employés sont ceux d’une forme de résistance, et l’on comprend très vite que pour Laurie-Anne Estaque, l’art est bien le lieu par excellence d’une proposition « alternative ». Il s’agit de révéler l’envers des choses, et de montrer que le discours dominant produit le contraire de ce qu’il prétend dire. Le travail sur les cartes géographiques est emblématique de cette démarche. La carte n’est-elle pas le lieu par excellence de l’expression d’une vision du monde ? Soutenue par la grâce d’un dessin très élaboré (car l’aspect plastique est au cœur de toute son œuvre), Laurie-Anne Estaque découpe les cartes du monde, les renverse, les brode, et propose des mises à jour bien plus critiques que celles de l’IGN — et peut-être plus conformes à la réalité : un petit dessin, un carré de couleur sont parfois plus fidèles qu’une carte ou un drapeau. Si les cartes fonctionnent selon des opérations d’aplatissement du réel ; les « anamorphoses » détournent le regard d’un monde chargé de données, piégé de trafics. Les continents s’étirent, se contractent et s’entrechoquent, déformés par le phénomène observé jusqu’à l’apparition de formes quasi organiques. La couleur domine. C’est elle qui témoigne {note}1.
1Jean Poussin, texte pour l’exposition au CAUE de la Haute-Vienne, Limoges, 2005.