Pensée dans la continuité de l’œuvre Printemps filmée en 2020 dans la forêt de l’île de Vassivière dans le Limousin, Morne (2021) a été réalisée à la Montagne Pelée à La Martinique. D’une île vers une autre, un dia- logue étrange s’installe entre deux situations. Au silence des corps enflammés errant dans la forêt, une femme solidement ancrée dans le sol du morne martiniquais entame des chants (méta)physiques.
Ses yeux sont fermés. Son corps est concentré. Il ressent. Lentement. A la fois vulnérable et enraciné, il se laisse affecter par le milieu dans lequel il s’inscrit en conscience. Il danse. Lentement. Il perd son identité humaine. L’être danse avec le vent, avec la végétation. Il respire le lieu pour être accueilli. Il est en alliance. Il avale la brume.
Il entre progressivement en connexion avec les éléments. Le râle profond des roches souterraines se transforme peu à peu en un cri puissant. Il dépasse l’échelle humaine. Il est le cri de Gaia. Une immensité qui se propage par- delà le temps et la géographie. Il déclama un chant chtonien. Il est le cri du morne lui-même, ou bien celui du sol, du ciel, de l’océan, des oiseaux ou de la brume. Des esprits du lieu. [...]
Chassée par les vents, la brume est de passage, elle génère des cycles. Elle participe d’une métamorphose constante. Julie Chaffort nous invite à prendre physiquement conscience du temps long du vivant. Elle nous invite à ralentir pour ressentir. L’être se remplit des voix du morne et des éléments pour devenir le vecteur d’un chant polyphonique, celui d’un appel au vivant.
Julie Crenn
images extraites de la vidéo
© Adagp, Paris