Enterrement de nuit

 

Enterrement de nuit, 2018 (extrait)
Vidéo couleur HD 16/9, 10 min.
Les acteurs : Matthieu Sanchez, Xavier Gonzalez, Dom, Lucas Pouvreau, Felix Baroux et Olivier Chassonnery
Équipe technique : Laure Subreville (réalisation et cadrage), Matthieu Sanchez (cadrage et prise de son) et Coline Gaulot (régie)
Lieu de tournage : Dordogne

 

Les liens qui unissent ces hommes sont complexes et ambigus. Il s’agit d’une communauté qui se réunit. Ces hommes ne sont pas frères de sang. Ils sont frères de cérémonie. Des liens, autres que l’amitié, existent au delà. Ce sont des exécutants, des passeurs entre les différents mondes. Celui des vivants, celui des morts et celui des visions entre les deux. Ces hommes sont présents pour exécuter un rituel qu’ils connaissent tous. Ils sont concentrés et reliés à cette tâche. Le temps de la cérémonie est un temps arrêté ou peut-être accéléré. C’est un temps sans le temps. Et les hommes sont tous les hommes à la fois. Le rituel décentre l’homme et le multiplie. Il est en même temps à l’intérieur de son corps, celui qui accomplit et hors de sa chair, celui qui est le témoin.

Le film met en scène une cérémonie d’enterrement en forêt. Le groupe d’hommes est accompagné d’une pelle mécanique qui est le personnage principal de cette fiction. L’engin agricole est mystique. C’est un animal sacré et monstrueux qui peut, à la fois, être inquiétant et docile. Il aide les hommes qui saluent en retour sa grande force.

Laure Subreville

 

  • Image extraite du film
  • Image extraite du film
  • Le baptême de Sancho
    Image extraite du film
  • Le baptême de Félix
    Image extraite du film

Écrits.
Laure Subreville, "Pourquoi enterrer et non enfouir", 2018

Je n’enfouis pas, j’enterre parce que j’ai un lien avec la terre.

Enfouir c’est « creuser dedans ». Lié davantage au côté psychologique : cacher, dissimuler ses pensées, ses sentiments, un trésor. Enterrer demeure un fait, une action liée à la matière, un rituel en dehors de toute psychologie personnelle (en dehors de toute morale. « Il ne s’agit pas de cacher mais de mettre à part », nous dit Quignard). Ou alors, si on cache, c’est pour préserver des bêtes, pour que le cadavre ne soit pas dévoré, et non pas caché de l’homme.

Contrairement à enfouir : on enfouit un trésor à la vue de l’homme, les bêtes s’en moquent. L’enterrement tient du monument, de la sculpture, du rite, du lieu qui dure (certes un temps), alors que l’enfouissement tiens davantage de la dissimulation à la vue (de l’indiscrétion, cupidité, préciosité, voire de l’anecdotique). Le trésor est enfouis et le cadavre est enterré.

Le trésor est inatteignable parce que volatile et fantasmé, toujours ailleurs (jeu de piste), donc inexistant. Alors que le cadavre c’est nous et on l’enterre. Pour moi, n’importe quel objet fera l’affaire à partir du moment où le geste, la forme qui fait monument, sculpture, trou, - c’est à dire la nomination - existe.

 

  • Vues de l’installation Enterrement de nuit, dans le cadre du Pavillon-EBABX, Fabrique Pola, Bordeaux, 2018
    Crédit photographique : Laure Subreville
  • Vues de l’installation Enterrement de nuit, dans le cadre du Pavillon-EBABX, Fabrique Pola, Bordeaux, 2018
    Crédit photographique :Laure Subreville
  • Vues de l’installation Enterrement de nuit, dans le cadre du Pavillon-EBABX, Fabrique Pola, Bordeaux, 2018
    Crédit photographique : Laure Subreville

 

© Adagp, Paris