Casemate

Autre référence à l’architecture de guerre présente dans l’exposition Casemate, une sculpture réversible en fonction du point de vue selon lequel le spectateur choisit de la regarder. Si l’on a coutume de préférer le terme bunker à celui de casemate, l’étymologie de ce dernier est aussi ambiguë que troublante. Le terme renverrait à la « maison folle » (casa « maison » et matta « folle ») {note}1. Paul Virilio évoque l’étymologie « maison forte » {note}2. C’est cette fois-ci l’habitat à l’échelle du corps tout entier, où la survie passerait par l’enfermement volontaire, qui semble détraqué. D’ailleurs, Nicolas Milhé met en place une sculpture schizophrène. D’un côté, le visiteur découvre une sorte de modèle réduit d’un autre topos de paysage : la montagne suisse dont la stylisation semble tout droit sortie d’une affiche de tourisme de Herbert Matter. De l’autre, cette illusion de maquette s’avère être une vue en coupe où la montagne est stratifiée en bunker géant, un arsenal sécuritaire poussé à son paroxysme qui rompt avec le pacifisme helvète. L’échelle adoptée par la sculpture, qui est celle d’une maquette, renforce la dimension de jeu, un petit théâtre des opérations d’un pays-Playmobil qui aurait perdu la raison.

Audrey Illouz

Extrait du texte Décors réversibles, 2011

 

Casemate, 2009
Polystyrène, résine acrylique, Plexiglas, bois, verre, peinture, acier, accessoires, 160 x 160 x 156 cm
Vues de l’exposition Casus Belli, Frac Aquitaine, Bordeaux

 

Détail
Détail
Crédits photographiques : Pascal Fellonneau

 

  • {Casemate}, 2009
    Casemate, 2009
    Vues de l’exposition Blue, White, Red, Black, (2009), Galerie West, Den Haag (Pays-Bas)
    Crédits photographiques : Galerie West
  • Détails
    Détails

 

© Adagp, Paris

1Selon le Grand Robert de la Langue Française « Casemate : ÉTYM. 1539 ; origine obscure ; peut-être. italien. casamatta, d’origine incertaine, peut-être de casa « maison », et matta « folle », ou du grec kasma, -atos « gouffre »

2le mot au moyen français matte « touffe d’herbe », d’où « maison couverte de touffes d’herbes ». Paul Virilio, Bunker archéologie, Editions Galilée, Paris, 1975 p.62