Borne démographique, 2012
Borne gravée et peinte, 35 x 65 cm
Commanditaires et partenaires : L’office Fronsadais des Arts et de la Culture et de la Communauté de Communes du Canton de Fronsac, la Mairie de Mouillac, le Conseil Général de la Gironde et le Conseil Régional d’Aquitaine.
Il n’y a de paysage que cadré, voire encadré. Mais de quoi sont faits ces cadres grâce auxquels nous observons, interprétons des petits morceaux de monde offerts à notre vue ? De diverses matières : sciences de la Vie et de la Terre, histoire et géographie, philosophie et poésie. Selon les goûts de l’amateur, ces matières s’agrègent les unes aux autres en proportions variables et constituent de la sorte un composite, alliage particulièrement résistant. D’où la difficulté de voir dans un paysage autre chose que ce que le cadre nous contraint à regarder. Mais certains d’entre nous y parviennent. Ce sont des scientifiques, des artistes, des enfants, des fous, des amoureux, tous animés par une curiosité sans limite. Michel Herreria est quelqu’un de cette espèce qui ne craint pas de passer les bornes, celles des pensées convenues et des plaisirs routiniers, pour se risquer vers l’inconnu.
Avec sa « borne démographique », il nous invite à jouer avec le cadre, à le métaphoriser pour questionner la manière dont se signifie la limite d’un territoire, la mesure d’une distance, l’administration d’un espace. Cet objet insolite révèle le temps qui passe dans un paysage, non pas celui des saisons mais celui des générations, celles qui ont habité, parcouru, cultivé et transformé un lieu. Implantée sur la frontière entre deux communes, cette borne générationnelle associe deux populations voisines avec leurs données démographiques respectives gravées sur l’une et l’autre face du bloc de pierre. Histoire de prendre la mesure de ce qui nous sépare et nous rapproche de ceux qui ont vécu ici avant nous. Par cet acte de création, le paysage redevient un art de la mémoire. Une mémoire affranchie de tout devoir et qui procède du seul pouvoir de l’imagination.
Jean-Paul Rathier, 2012
Crédits photographiques : Michel Herreria