« Ce tableau présente deux types d’écran qui se superposent. Au premier plan deux rideaux de pluie argentée cachent l’arrière-plan qui est un paysage de neige qui se déploie dans un espace d’une faible profondeur de champ. Ces deux espaces se présentent chacun comme un plan frontal où apparaissent ou disparaissent les formes. Le premier, la pluie, permet d’obstruer ou de rendre visible le paysage selon le placement du spectateur. Ces deux rideaux de pluie permettent de montrer ou de cacher le paysage, cela tient de la matière de peinture argentée que j’ai utilisée. C’est le spectateur dans son déplacement latéral qui va voir émerger ou se dérober les formes. »
"J’ai peint ce tableau en 2019, en France, au retour de mon quatrième séjour à Téhéran. Je suis partie de deux images, une vue plongeante sur les toits-terrasses d’un quartier populaire au nord de Téhéran et la photographie en contre-plongée du ministère de la guidance qui a été construit en 1970 avant la révolution. La prise de vue de ce bâtiment est interdite par le régime iranien. Ce tableau représente l’opposition entre ces deux points de vue. La ville de Téhéran est bâtie sur une topographie particulière. Située dans le nord du pays, au pied des monts Elbourz qui l’irriguent, elle se déploie sur une plaine en pente vers le sud vers le désert stérile (Kavir). Et l’on peut faire une autre lecture de la ville, culturelle, par strates. Les sous-sols pouvant accueillir des espaces de liberté, souvent intimes ou associatifs, la rue avec ses principes et ses lois autoritaires et les toits où l’on peut se retrouver, en petit comité pour échanger, écouter de la musique, danser, ce sont souvent des espaces intimes.
J’ai coloré les climatiseurs des toits-terrasses, c’est comme dans un jeu vidéo et j’ai dissout la représentation interdite du ministère de l’intérieur. Cette œuvre signifie la liberté de plonger sur les toits pour faire la fête, qui s’oppose à l’écrasante autorité du système politique qui se décompose et répand son toxique."
© Adagp, Paris